ecstasy drogueLes amphétamines (alpha-méthyle-phénéthylamine) constituent une famille de plusieurs substances chimiques à effet comparable. L’action principale est due à une amine psychostimulante, sympathicomimétique et sérotoninergique.

Dans la plupart des pays du monde, les amphétamines sont considérées comme stupéfiants (substances illégales entraînant une accoutumance et un état de stupeur) dont la consommation, la détention, la vente et le transport sont interdits.

Ces sont des substances à effet euphorisant et stimulant. Elles augmentent la vigilance, la confiance en soi, la concentration et la capacité de travail. Elles limitent la sensation de fatigue et de faim et diminuent le besoin de sommeil. Elles entraînent des troubles de l'érection chez l'homme mais augmentent le désir sexuel. Leur prise régulière induit une dépendance et peut entraîner un épuisement de l'organisme, des troubles psychiques, des complications cardiovasculaires (HTA, infarctus et AVC), neurologiques et oro-gastro-intestinales (caries dentaires, constipation, iléus paralytique).

L’amphétamine est une molécule découverte depuis le début du 20ème siècle, elle fut utilisée pendant la seconde guerre mondiale pour améliorer les performances et surtout l'endurance des soldats (dissipent les sensations de fatigue et de faim). Elle n’a commencé à se diffuser que plusieurs décennies plus tard comme drogue illicite.

I. LES PRINCIPALES AMPHÉTAMINES :

khat amphétamine intoxication1. Les cathinones :

L'alcaloïde est présent à l’état naturel dans les feuilles d’un arbuste africain nommé Catha Edulis (ou KHAT) dont la commercialisation est libre seulement au Yémen et aux pays de la corne d’Afrique (Djibouti, Somalie et Ethiopie). Leur consommation est très répandue dans ces pays, c’est une habitude sociale tout comme la consommation de café dans les autres sociétés. La matière végétale est mâchée en boule, qui est maintenue pendant un certain temps dans la joue, provoquant un renflement caractéristique. Une séance peut durer plusieurs heures et provoque une hyper salivation. Pendant ce temps, les mâcheurs boivent de grandes quantités de liquides tels que du cola, du thé et de l'eau froide. Le khat frais contenait en moyenne 36 mg de cathinone, 120 mg de cathine et 8 mg de noréphédrine par 100 grammes de feuilles [1].

2. Les cathiones de synthèse :

Méphédrone drogue intoxicationCes sont les dérivés de la substance naturelle du khat, fabriqués par des laboratoires clandestins. On distingue plusieurs variétés se présentant le plus souvent sous forme de poudres amorphes ou cristallines blanches ou brunes, parfois en gélules.

Certains usagers sniffent la Méphédrone (4-méthylméthcathinone), mais la plupart des cathinones sont ingérées [2]. 

Le dosage et le contenu de ces substances ne sont connus que par leurs fabricants.

3. L’ecstasy ou MDMA (3,4 méthylène-dioxy-métamphétamine) :

intoxications par l'ecstasyElle est souvent utilisée comme drogue récréative, vendue sous forme de cristaux, poudre ou comprimés multicolores. Elle peut être fumée, reniflée, injectée ou avalée. L’ecstasy (MDMA) est consommée souvent durant les loisirs, surtout les week-ends dans les discothèques, les clubs et les fêtes. De coût relativement faible, elle est accessible aux jeunes adolescents , elle occupe le 3ème rang des drogues les plus utilisées en Europe après le cannabis et la cocaïne [3][4].
La teneur d’un comprimé MDMA est très variable (44 mg à 128 mg ou même 300 mg), la dose toxique pour l’adulte est autour de 120 mg [3]. La survenue d’effets indésirables graves allant parfois jusqu'au décès est à craindre en cas de comprimés surdosés. L’association avec de l’alcool, du cannabis ou de la cocaïne potentialisent le risque. (Voir notre cas clinique : une folie brusque)

4. Le captagon :
capatagon amphétamines droguesLe CAPTAGON© est une phénéthylamine, drogue psychostimulante de synthèse de la famille des amphétamines. Il contient la FÉNÉTYLLINE qui est issue d’une combinaison chimique d’amphétamine et de théophylline. Cette molecule est interdite depuis 1986 mais elle est synthétisée clandestinement dans certains pays de l’Europe de l’est et du moyen orient. Cette substance a les mêmes effets indésirables des amphétamines.
Le captagon a été nommé "drogue des djihadistes" par les médias depuis la guerre en Syrie et les attentats de 2015 en France et en Tunisie, mais un doute persiste concernant la vraie formule chimique de la substance qui aurait été consommée par les terroristes [5][6]. Les contrefaçons des comprimés sont souvent vendus aux pays du golfe comme mélange de plusieurs substances (caféine, paracétamol, chloroquine, théophylline et autres) avec le symbole du Captagon (c) et probablement sans ou avec une faible quantité de FÉNÉTHYLLINE [5].

II. MÉCANISME DE TOXICITÉ DES AMPHÉTAMINES :

La toxicité des amphétamines provient de leur effet sympathomimétique. Le mécanisme d’action principal est une libération présynaptique des catécholamines, principalement la noradrénaline et la dopamine. À dose plus élevée, et plus spécifiquement pour le MDMA, les amphétamines peuvent aussi causer une libération présynaptique de la sérotonine.
L’élimination des amphétamines se fait par transformation hépatique et élimination rénale.

III. SIGNES CLINIQUES :

Le diagnostic d’une intoxication par le MDMA ou par les cathinones se fait principalement au moyen de l’interrogatoire et de l’examen clinique du patient.
Les signes apparaissent 30 à 40 minutes après l’ingestion, l’effet toxique dépend de la dose absorbée.

PRÉSENTATION CLINIQUE EN FONCTION DE LA GRAVITÉ DE L’INTOXICATION [7]  
 Toxicité legère  Toxicité modérée Toxicité grave 
Nausées
Vomissements
Agitation
Confusion
Tremblements
Douleur abdominale
Sueurs
Mydriase
Tachypnée
Tachycardie
Hypertension HTA
Palpitations
Douleur thoracique
Dyspnée
Dyskinésies
Céphalée
Hallucinations
Hyperkaliémie
Oligurie
Hématémèse
Rectorragie
Leucocytose
Hépatotoxicité (cytolyse)
Hyperthermie. Température >39°c
Acidose métabolique
Rhabdomyolyse
Hypotension artérielle
Insuffisance rénale aigue
Convulsions
Stupeur/coma
Colite ischémique
Tachyarythmies ventriculaires
Insuffisance ventriculaire gauche
Œdème pulmonaire
Vascularite cérébrale
Hémorragie cérébrale
Hémiparésie
Coagulation intravasculaire disséminée CIVD
  •  Signes tardifs : insomnie, apathie, état dépressif, anxiété qui peuvent persister quelques heures, voire plusieurs jours.
  • Signes particuliers : Une surdose de MDMA peut entraîner un syndrome sérotoninergique (SS ou syndrome 5-HT) :

Toxidrome Sérotoninergique intoxication

TOXIDROME SÉROTONINERGIQUE  
Signes cliniques  Agents sérotoninergiques en cause 
 Hyperthermie, Sueurs, Tremblements, Frissons, Agitation, Troubles de la conscience, Myoclonies, Troubles de la coordination motrice, Rigidité musculaire, Confusion, Convulsions, Hyperréflexie, Tachycardie, Diarrhée, Bruxisme (grincement des dents)  Opioïdes, Amphétamines, Ecstasy, Cocaïne, LSD, Antidépresseurs ISRS/ISRN, bleu de méthylène, IMAO, antipsychotiques, anti migraine (Triptans), interactions (ex. : Oxycodone + Tramadol), Millepertuis (plante)
  • L’hyperthermie maligne (température >39°) suite à la prise d’amphétamines est un phénomène bien documenté par plusieurs auteurs [5]. Elle survient brutalement dans les premières 24 heures,
  • Elle est de mauvais pronostic à cause de ses complications : l’hyponatrémie, le SIADH (sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique), la rhabdomyolyse, les convulsions, l’hémorragie cérébrale, la CIVD et la défaillance multi-viscérale [6][9].
  • Devant une hyperthermie maligne il faut éliminer les diagnostics différentiels : un syndrome malin des neuroleptiques, une infection, un trouble métabolique, un sevrage, un délirium tremens, etc.

Pour plus de détails sur l'hyperthermie : voir notre article (Coup de chaleur et hyperthermie maligne d'exercice)

IV. SIGNES BIOLOGIQUES :

  • Analyse toxicologique : l’ecstasy et ses métabolites peuvent être décelés pendant 24 heures dans le sérum sanguin, jusqu’à trois jours dans l’urine et plusieurs mois dans les cheveux.
  • En cas d’hyperthermie : bilan sanguin et urinaire complet.
  • Si une rhabdomyolyse est suspectée : dosage sérique de la créatine kinase CPK et de la myoglobinurie toutes les 12 heures jusqu’à normalisation des valeurs.

V. PRONOSTIC :

Le risque de mort lié à l’intoxication par l'ecstasy est faible comparé à d'autres drogues. Les décès sont principalement attribuables aux complications cardio-pulmonaires (troubles du rythme, œdème pulmonaire), à l’hyperthermie maligne ou à une hémorragie cérébrale.

VI. MESURES THÉRAPEUTIQUES :

Les intoxications par les amphétamines nécessitent une prise en charge hospitalière avec surveillance en continu des paramètres vitaux.
Traitement symptomatique des troubles respiratoires, cardiaques et électrolytiques,

  • Le Charbon végétal activé n’est pas recommandé,
  • L'acidification urinaire accélère l'excrétion d'amphétamines mais elle est contre indiquée car elle peut aggraver les précipitations de la myoglobine dans les tubules rénaux,

Le traitement de l’hyperthermie maligne est essentiel :

  • Mettre le patient dans un endroit frais, le dévêtir, humidifier sa surface corporelle, et appliquer de la glace au niveau du cou, des aisselles et des plis de l’aine. L’immersion dans l’eau froide est recommandée. Aérer énergiquement (fenêtres ouvertes, ventilateur).
  • Réhydratation par NaCl 0,9% - 1 litre/30 min en perfusion.
  • Sédation par les benzodiazépines (Diazépam ou Midazolam) en perfusion.
  • En cas de coma et troubles respiratoires : intubation, ventilation mécanique et curarisation par un curare non dépolarisant (CELOCURINE® contre-indiqué).
  • Dialyse en cas d’insuffisance rénale.
  • L’efficacité du traitement par Dantrolène n’est pas prouvée.
  • Les Salicylés, Paracétamol et Corticoïdes : non efficaces et contre indiqués par risque d'aggravation.
  • Le seul antagoniste de la sérotonine reconnu est la Cyproheptadine (PERIACTINE®) qui est un antihistaminique [10]. Elle peut être proposée lorsque la température dépasse 38,5 C° ou en cas de rigidité musculaire importante [10].

À RETENIR :

  • Le diagnostic des intoxications par les amphétamines repose sur le contexte, l’interrogatoire et l’examen clinique.
  • Reconnaitre les signes cliniques évoquant un toxidrome sérotoninergique.
  • L’hyperthermie maligne est une complication grave lors d’intoxication par les MDMA, c’est une urgence vitale nécessitant la prise en charge en soins intensifs.
  • Le psychiatre est sollicité précocement dans la prise en charge des patients dès que leur état est stable.

BIBLIOGRAPHIE :

  1. Nasir Tajure Wabe : Chemistry, pharmacology, and toxicology of khat (catha edulis forsk): a review. Addict Health, 2011 summer-autumn; 3(3-4): 137–149.
  2. European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction : Les cathinones de synthèse, fiche drogue (emcdda.europa.eu)
  3. Observatoire français des drogues et des tendances addictives : ecstasy (ofdt.fr)
  4. Addiction Suisse (addictionsuisse.ch)
  5. Observatoire français des drogues et des tendances addictives : Captagon, déconstruction d’un mythe, rapport juillet 2017 (ofdt.fr)
  6. Ahmed AL‐Imam et al. : Captagon, use and trade in Middle-East. Hum Psychopharmacol Clin Exp, 2017; 32:e2548.
  7. INSPQ : Bulletin d’information toxicologique du Québec, volume 32, numéro 2, juin 2016 (inspq.qc.ca)
  8. Jean-Michel Costes : Nouvelles drogues, nouveaux usages, le cas de l’ecstasy. adsp n° 37 décembre 2001, 13-16
  9. Pauline Thiébot et al. : Consommation d'ecstasy surdosée : à propos d'un cas mortel. Toxicologie Analytique et Clinique. Volume 32, Issue 4, Supplement, décembre 2020, Page S23
  10. Orphanet : Syndrome sérotoninergique, fiches orphanet urgences, 2018 (orpha.net)

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