Prise en charge du coma1. Définition

Le coma est un état de non-réponse prolongée caractérisé par une absence d’éveil et de conscience. Il résulte d’une altération diffuse ou focale du système d’éveil cortico-sous-cortical, et représente une urgence diagnostique et thérapeutique.

2. Évaluation initiale du coma

Échelles d'évaluation

La Glasgow Coma Scale (GCS) demeure l’outil de référence pour décrire le niveau de conscience, notamment dans les contextes traumatiques 1. Cependant, elle présente certaines limites, notamment chez les patients intubés ou paralysés. [Lisez notre article score de Glasgow]

Le FOUR score (Full Outline of UnResponsiveness) apporte une évaluation plus complète grâce à l'intégration des réflexes du tronc cérébral et de l’activité respiratoire 2. (Lisez notre article sur le score FOUR)

Approche ABCDE

L'évaluation initiale suit la logique systématique ABCDE. Les causes réversibles et fréquentes incluent hypoglycémie, hypoxie, intoxications, causes métaboliques ou toxiques, et troubles hémodynamiques 3.

3. Examen clinique

L'examen neurologique comprend :

  • réactivité pupillaire, recherche d’anisocorie (inégalité de diamètre des pupilles)
  • réflexes du tronc : oculocéphaliques, cornéens, tussigènes
  • motricité spontanée ou provoquée
  • postures anormales (décortication, décérébration)

La recherche d’un signe localisateur (hémiparésie, déviation conjuguée du regard) peut orienter vers un AVC, tandis que les signes d’atteinte du tronc suggèrent une cause potentiellement grave.

4. Principales étiologies

Causes traumatiques

Le traumatisme crânien sévère demeure une cause fréquente de coma. Les recommandations actuelles insistent sur le contrôle agressif de l’hypertension intracrânienne, la ventilation protectrice et la réalisation rapide d’une imagerie cérébrale 4.

Causes métaboliques et toxiques

Les causes métaboliques incluent hypoglycémie, hypercalciémie, hyponatrémie, encéphalopathie hépatique ou urémique. Elles représentent une part importante des comas non traumatiques, particulièrement chez les patients âgés ou polypathologiques 3

 Causes vasculaires

AVC ischémiques ou hémorragiques du tronc cérébral, hémorragies intracérébrales massives, thromboses veineuses cérébrales. La rapidité du diagnostic influence le pronostic fonctionnel.

Causes post-arrêt cardiaque

Le diagnostic étiologique et la stratification pronostique suivant un arrêt cardiaque reposent sur une approche multimodale, incluant examen clinique, EEG, imagerie, biomarqueurs, et respect d'un délai minimum pour l'évaluation 5,6.

Cause épileptique

Le status épilepticus convulsif ou non convulsif doit être systématiquement évoqué. L’EEG rapide est essentiel pour un diagnostic précoce et un traitement adéquat 9–12.

5. Examens complémentaires

Imagerie

Le scanner cérébral sans injection est l’examen de première intention chez tout patient en coma inexpliqué. L’IRM est indiquée dans un second temps si le diagnostic n’est pas établi.

Biologie

Les examens à réaliser en urgence incluent : glycémie capillaire (toujours), ionogramme, gaz du sang, fonction hépatique et rénale, dosage toxiques selon contexte, hémostase en cas de suspicion hémorragique.

Électroencéphalogramme (EEG)

Le recours à l’EEG rapide est de plus en plus recommandé, notamment grâce à l’émergence de l’EEG point-of-care (POC-EEG), permettant un dépistage accéléré des crises non convulsives 7. Les études récentes montrent également son intérêt organisationnel et économique dans les filières neuro-urgentes 8.

6. Prise en charge aux urgences

La prise en charge initiale doit se faire en parallèle du diagnostic :

  • Protection des voies aériennes (intubation si GCS ≤ 8)
  • Ventilation et oxygénation optimales
  • Stabilité hémodynamique (remplissage, vasopresseurs si nécessaire)
  • Correction des causes métaboliques identifiées
  • Traitement immédiat d’un status épilepticus : benzodiazépine, anti-épileptique de seconde ligne, puis agents anesthésiques en cas de réfractarité 9–12
  • Transfert vers une unité de soins intensifs adaptée au diagnostic suspecté

7. Conclusion

Le coma est un motif fréquent d’admission en urgence, engageant rapidement le pronostic vital. L'approche doit être systématique, intégrant évaluation clinique structurée, imagerie rapide, EEG, et recherche des causes réversibles. Les recommandations récentes soulignent l’importance d’une approche multimodale, de l’utilisation croissante du POC-EEG, et de protocoles uniformisés pour optimiser le pronostic.

Signes cliniques Étiologies probables Conduite à tenir
Coma + pupilles normales • Causes métaboliques (hypoglycémie, hyponatrémie, urémie)
• Intoxications
• Post-critique
• Encéphalopathies (hépatique, septicémique)
• Vérifier immédiatement glycémie
• Bilan métabolique complet
• ECG, gaz du sang
• Traitement étiologique rapide
• EEG si suspicion crises non convulsives
Anisocorie, mydriase unilatérale • Engagement temporal (HTIC)
• AVC hémorragique
• Tumeur, processus expansif
• Traumatisme crânien
• Scanner cérébral en urgence
• Élévation tête du lit 30°
• Hyperventilation modérée si détérioration
• Mannitol ou hypertonique selon protocole
• Avis neurochirurgical immédiat
Coma fébrile • Méningite, méningo-encéphalite
• Sepsis sévère
• Encéphalite herpétique
• Hyperthermie d’effort
• Hémocultures, bilan infectieux
• TDM avant PL si signes focaux
• Antibiothérapie +/- acyclovir immédiate
• Contrôle température et hémodynamique
Posture de décortication, décérébration • Lésion cérébrale sévère (TC, AVC massif)
• Engagement
• Hypoxie sévère
• ABC immédiat (intubation si GCS ≤ 8)
• Scanner cérébral urgent
• Contrôle HTIC
• Admission soins intensifs
Myoclonies, suspicion état de mal non convulsif • Status épilepticus
• Encéphalopathies métaboliques
• Post-ACR
• EEG urgent / POC-EEG
• Benzodiazépines puis antiépileptiques minutes 5–20
• Perfusion anesthésique si réfractaire
• Contrôle ventilation, hémodynamique
Raideur de nuque, syndrome méningé • Méningite bactérienne
• HSA (hémorragie méningée)
• Encéphalite virale
• Scanner si déficit focal ou suspicion HIC
• PL si sûre, sans délai
• Antibiotiques + corticoïdes précoces
• Acyclovir si suspicion HSE
Coma après effort, hyperthermie majeure • Coup de chaleur
• Hyperthermie maligne
• Syndrome sérotoninergique / malin des neuroleptiques
• Refroidissement rapide
• Arrêt agents inducteurs
• Benzodiazépines si agitation
• Dantrolène si hyperthermie maligne suspectée
Déviation conjuguée du regard • AVC hémisphérique
• Crise épileptique focale
• Processus expansif
• Scanner / IRM rapide
• EEG si doute épileptique
• Prise en charge neurovasculaire urgente
Coma avec signes toxiques
(myosis, mydriase, bradypnée, odeur, dépôts cutanés)
• Opiacés (myosis serré, bradypnée)
• Benzodiazépines
• Alcohols (éthanol, méthanol, éthylène-glycol)
• Anticholinergiques (mydriase, agitation, peau chaude sèche)
• Cholinergiques (SLUDGE, bronchorhée, bradycardie)
• CO (céphalées, confusion, coma)
• Intoxication mixte / poly-intoxication
• GLU, ionogramme, gaz du sang, toxiques sanguins/urinaires
• Naloxone si suspicion opiacée
• Charbon activé si prise récente
• Support ventilatoire si dépression respiratoire
• Antidotes spécifiques (OHP, atropine + pralidoxime, etc.)
• Imagerie ou EEG selon contexte

Références bibliographiques

  1. Teasdale G, Jennett B. Assessment of coma and impaired consciousness. Lancet. 1974;304(7872):81-84.
  2. Wijdicks EF, et al. Validation of a new coma scale: The FOUR score. Ann Neurol. 2005;58:585-593.
  3. StatPearls. Coma. StatPearls Publishing; 2025.
  4. Brain Trauma Foundation. Guidelines for the Management of Severe Traumatic Brain Injury. Neurosurgery. 2017;80(1):6-15.
  5. Rajajee V. Prognosis After Cardiac Arrest. N Engl J Med. 2023;389:101-112.
  6. Nolan JP, et al. European Resuscitation Council and ESICM Guidelines 2021. Resuscitation. 2021;161:220-269.
  7. Fratangelo M, et al. Feasibility and reliability of point-of-care EEG in emergency settings. Clin Neurophysiol. 2025;156:1-10.
  8. Bannouvong H, et al. Economics of point-of-care EEG systems in acute neurologic care. Neurocrit Care. 2024;41:115-124.
  9. Brophy GM, et al. Guidelines for the evaluation and management of status epilepticus. Neurocrit Care. 2012;17(1):3-23.
  10. Trinka E, Höfler J. Acute management of status epilepticus. Lancet Neurol. 2023;22:123-134.
  11. Sutter R, et al. Epidemiology and emergency management of status epilepticus. JAMA Neurol. 2022;79:1135-1147.
  12. Rossetti AO, et al. Treatment strategies for refractory status epilepticus. N Engl J Med. 2023;388:145-158.

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