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  Mise à jour 2022  

L’accident d’exposition au sang (AES) ou à des liquides biologiques est défini comme tout contact cutané ou muqueux avec le sang ou un liquide biologique provenant d’un patient. L’exposition percutanée survient après piqûre ou blessure avec un instrument vulnérant souillé (aiguille de seringue, aiguille de suture, lame de bistouri, …). L’AES est la conséquence aussi d’une projection de ces liquides sur une peau préalablement lésée ou une muqueuse (yeux, bouches). Les liquides biologiques sont par exemple : pus, ascite, salive, urines, liquide amniotique, sperme,…
Cet accident du travail est fréquent chez les professionnels de santé. L’exposition sexuelle, de risque et de conduite à tenir comparables, n’entre pas dans le cadre d’un AES.

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A/ QUEL EST LE RISQUE ?

Le sang et les liquides biologiques peuvent véhiculer des agents infectieux divers (bactéries, virus, parasites et champignons). En pratique trois sont à redouter : virus VIH (virus de l’immunodéficience humaine responsable du Sida), VHB (Hépatite B) et VHC (Hépatite C).
Le risque de transmission virale entre patients et soignants lors d’un AES est variable selon le virus en cause, le mode d’exposition et le liquide biologique concerné. Il est fortement lié au niveau de charge virale plasmatique du patient source au moment de l’accident.Le risque de séroconversion VIH après une exposition percutanée est estimé à 0,3%, il est dix fois plus faible après une exposition cutanéomuqueuse.

L’exposition au sang ou liquide biologique d’un patient à sérologie virale positive peut être à :

  • Risque important en cas de plaie profonde ou avec une aiguille creuse de prélèvement veineux ou artériel contenant du sang.
  • Risque intermédiaire s’il implique une aiguille préalablement utilisée pour une injection sous cutanée ou intramusculaire, une aiguille pleine comme par exemple une aiguille à suture ou avec bistouri ou en cas de projection cutanéomuqueuse (yeux, bouche,..) avec un temps de contact supérieur à 15 min.
  • Risque faible en cas de crachat, morsure ou griffure ou en cas de piqure par aiguille abandonnée, car il s’agit soit d’aiguille ne contenant pas de sang ou dont le sang est coagulé.

B/ CONDUITE À TENIR DEVANT UN AES :

1. Désinfecter immédiatement la plaie :

  • Nettoyer la peau avec l’eau et du savon. Désinfecter avec une solution chlorée (Dakin®, Amuchina® ou Amukine®, à défaut avec l’eau de javel dilué au 1/5) ou avec une solution iodée (Bétadine®) : imbiber une compresse et la mettre sur la plaie durant au moins 5 min. L’alcool 70° et la solution hydro-alcoolique ne sont pas efficaces contre tous les microorganismes et sont à éviter en cas de peau lésée.
  • Pour les muqueuses : rincer abondamment avec le sérum physiologique puis désinfecter avec le Dakin® ou la Bétadine® bain de bouche 10% (flacon vert).
  • Pour les yeux : lavage ave le sérum physiologie et désinfecter avec un collyre antiseptique.

2. Vérifier le statut sérologique du patient source :

Le Patient source est la personne dont le sang ou le liquide biologique est à l'origine de l'infection.

  • Vérifier sur le dossier du patient source si son statut sérologique est connu, sinon lui faire des prélèvements sanguins avec son accord préalable.
  • Rechercher : Anticorps anti HIV (SIDA) par test rapide et lorsqu'il est positif on recherche la charge virale plasmatique., Antigène et Anticorps HBs (hépatite B), Anticorps anti HVC (hépatite C); 

3. Consultation médicale urgente (en moins de 4 heures) :

Le service des urgences est la filière privilégiée de prise en charge des AES. Le suivi doit être assuré par le médecin du travail et/ou par un spécialiste en maladies infectieuses.
Le médecin examine la victime et rédige le dossier médical en précisant les circonstances et la nature de l’exposition. Il vérifie le statut vaccinal contre le tétanos et l’hépatite. Il évalue le risque de transmission virale (VHB, VHC, VIH).

  • Seul un médecin senior peut envisager, avec l’accord de la personne accidentée, une éventuelle chimioprophylaxie antirétrovirale en fonction de la sévérité de l’exposition, de la connaissance du statut sérologique du sujet source, de l’inoculum et du délai (Tableau I).
  • Limiter la prescription d’antirétroviraux là où le risque est identifiable, pour cela il est indispensable de rechercher le statut sérologique de la personne source dès que possible par le test de diagnostic rapide (TDR).
  • S’il est nécessaire, ce traitement prophylactique comportera une trithérapie : deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) et un autre agent. Il doit débuter de façon optimale dans les 4 heures qui suivent l'AES et au plus tard dans les 48h au risque d’efficacité restreinte. Sa durée est de 4 semaines et il n’est pas dénudé d’effets indésirables.
    • TRUVADA® (ténofovir + emtricitabine) 1 comprimé/jour + EDURANT® (rilpivirine) 1 comprimé/jour
    • Ou EVIPLERA® (rilpevirine + ténofovir + emtricitabine) 1 comprimé/jour
  • La prophylaxie de l’hépatite peut débuter dans les 72h : vaccination et immunoglobulines lorsque le risque est entrevu. Aucun traitement prescrit lorsque le personnel est déjà vacciné avec un taux d’anticorps anti-HBs > 10 UI/L.
  • Le suivi de la victime d’AES est réalisé en médecine du travail et/ou en médecine infectieuse. Le suivi biologique s’étale sur 4 mois (Tableau II).

4. Déclaration d’accident de travail :

La déclaration administrative est une formalité obligatoire mais non urgente ! Elle peut se faire dans les heures ouvrables dans un délai de 24 heures. Le médecin consultant rédige le certificat médical descriptif avec mention du risque biologique et la conduite à tenir adoptée. 

C/ LA PRÉVENTION DES AES :

La procédure de prise en charge des AES doit être clairement établie dans chaque hôpital et bien connue par tous les soignants. Un protocole de prévention nécessite la collaboration entre administrateurs, médecins référents de chaque service, surveillants, infirmiers et ouvriers de nettoyage. Une formation spécifique est indispensable afin d’assurer une prise en charge globale optimale.

  • Lavage des mains avec eau et savon avant et après tout acte de soin.
  • Protection par des gants, lunettes, masques, surblouses au cours des gestes chirurgicaux et obstétricaux. Les gants ne protègent pas contre la piqure mais réduisent la quantité de sang introduit.
  • Ne jamais remettre les aiguilles ou les bistouris utilisés dans leurs capuchons avec les deux mains. Pour se faire il faut utiliser une seule main et caler le capuchon dans un plateau ou dans un portoir de tube.
  • Le prélèvement de sang veineux doit être effectué avec un matériel de prélèvement sous vide.
  • Lors d'un acte de petite chirurgie, il est conseillé d'utiliser une pince ou des écarteurs (et non la main contro-latérale) et de ne pas faire de nœud avec l'aiguille en place.
  • Utiliser des conteneurs spéciaux (dits Objets Piquants Coupants Tranchants ou OPCT) pour jeter les aiguilles et les lames de bistouris souillées. Ces conteneurs étanches doivent être à porté de la main (<50 cm) pour jeter immédiatement l’objet sali. Les ouvriers de nettoyage sont obligatoirement informés des précautions à prendre en cas de collecte et d’acheminement de ces récipients.
  • Marquer les prélèvements sanguins d’un patient infecté par une étiquette spéciale.
  • Consulter votre médecin du travail pour actualiser les vaccinations contre l’hépatite et le tétanos

Le traitement post exposition (TPE):

 "Il est essentiel de faire comprendre que si le TPE est efficace, il l’est d’autant plus que le délai d’administration est court. Il faut donc s’efforcer de raccourcir au maximum ce délai et de commencer le traitement dans les 4 premières heures qui suivent l’exposition. Il peut être initié au plus tard jusqu’à 48 h après l’exposition mais son efficacité en est réduite."(2)

* La sérologie du test HIV est le seul examen permettant le diagnostic formel de l'infection par le virus HIV( SIDA).

* Les Anticorps anti HIV seront fabriqués au bout de 2 à 3 semaines après l'inoculation du virus.

** Réalisation du test rapide d’orientation diagnostique dans les situations d’urgence:
Un test rapide d’orientation diagnostique détectant l’infection à VIH 1 et 2 peut être pratiqué sur sang total, sérum ou plasma, au moyen d’un réactif à lecture subjective,revêtu du marquage CE. Tout test rapide d’orientation diagnostique est obligatoirement validé, que la recherche soit négative ou positive, par un diagnostic biologique [sérologie] de l’infection à VIH. Le test rapide [en mois de 2 heures] peut être effectué au cabinet médical.

  • Accident d’exposition au sang : le test rapide d’orientation diagnostique est proposé à la personne «source».
  • Accident d’exposition sexuelle : ce test est proposé aux partenaires.

Source : Arrêté du 28 mai 2010 fixant les conditions de réalisation du diagnostic biologique de l’infection à virus de l’immunodéficience humaine (VIH 1 et 2) et les conditions de réalisation du test rapide d’orientation diagnostique dans les situations d’urgence. JORF n°0131 du 9 juin 2010 page 10572 - texte n° 31 - legifrance.gouv.fr


 POUR EN SAVOIR PLUS :

  1. Rapport du Groupe d’Experts 2008 sur la prise en charge médicale des patients infectés par le VIH, sous la direction du Pr Patrick Yeni (Chapitre 8 - Prise en charge des situations d’exposition au risque viral : p341-357). Site la documentation française.
  2. Rapport 2010 - Pr. Patrick Yeni - Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH - Site Ministère de santé - Franceinistère de santé - France
  3. Groupe d’Étude sur le Risque d’Exposition des Soignants aux agents infectieux (GERES)
  4. Examens biologiques et suivi à réaliser chez une victime d'accident d'exposition au sang : AtouSante.com
  5. A télécharger PDF : Conduite à tenir devant un accident avec exposition aux risques viraux (2017), Site protocoles d'urgences
  6. Guide Eficatt : Exposition fortuite à un agent infectieux et conduite à tenir en milieu de travail. Le guide met à disposition du médecin les éléments utiles pour l'aider à évaluer le risque, définir la conduite à tenir immédiate, définir les actions à entreprendre ainsi que le suivi médical à mettre en place. Site INRS
  7. Mise à jour : Groupe d’experts pour la prise en charge du VIH sous la direction du Pr Philippe MORLAT, Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH, 2017. À lire sur ce lien

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ALLERGIE AIGUË : CE QU’IL FAUT SAVOIR
- La réaction allergique se manifeste par différents symptômes : rhinite, asthme, eczéma, urticaire et/ou conjonctivite.
- L'angio-œdème ou œdème de Quincke est l’œdème rapide de la peau, des muqueuses et des tissus sous-muqueux (souvent à la face et au cou) entrainant l’obstruction des voies aériennes et peut provoquer une asphyxie aigue.
- Le choc anaphylactique est la forme la plus grave de l’allergie qui nécessite un traitement immédiat. Il débute soit progressivement avec prurit, urticaire, œdème de Quincke ou une gêne respiratoire (bronchospasme) soit de façon brutale avec effondrement de la tension artérielle, perte de la conscience et risque imminent d’arrêt cardiaque. C’est une urgence vitale.

Le diagnostic différentiel entre choc anaphylactique et choc vagal est parfois difficile dans le cas par exemple d’un patient qui présente une lipothymie et hypotension suite à une injection médicamenteuse ou douleur aigue. Dans le choc anaphylactique on observe une tachycardie, la peau est chaude et rougeâtre (à cause de la vasodilatation) alors que dans la malaise vagale le patient est pâle et bradycarde.

Une anaphylaxie est probable quand l’une de ces 3 situations cliniques apparaît brutalement [SFMU 2016]. 
 1. Installation aiguë (minutes à quelques heures) d’une atteinte cutanéomuqueuse de type urticarienne (éruption généralisée, prurit, œdème des lèvres, de la langue ou de la luette) ET au moins un des éléments suivants :
• Atteinte respiratoire (dyspnée, bronchospasme, hypoxémie)
• Hypotension artérielle ou signe de mauvaise perfusion d’organes (Syncope, collapsus)
 2. Au moins deux des éléments suivants apparaissant rapidement après exposition à un probable allergène pour ce patient (minutes à quelques heures) :
• Atteinte cutanéomuqueuse
• Atteinte respiratoire
• Hypotension artérielle ou signes de mauvaise perfusion d’organes
• Signes gastro-intestinaux (douleurs abdominales, vomissements, etc.)
 2. Hypotension artérielle après exposition à un allergène connu pour le patient (minutes à quelques heures)

CONDUITE A TENIR DEVANT UN CHOC ANAPHYLACTIQUE :

MISE EN CONDITION : éviction de l’allergène, mettre le patient en position de Trendelenburg ou assis si gêne respiratoire ou en PLS si inconscience. OXYGÈNE À FORT DÉBIT (SpO2 >95%), abord veineux et surveillance clinique des paramètres vitaux.
ADRÉNALINE LE PLUS TÔT POSSIBLE :
Commencer par 0,3 à 0,5 mg en injection IM ou S/C. Enfant : 0,01 mg/Kg.
Si échec : par titration, 1 mg dilué dans 10 ml NaCl 0,9%, à injecter 1 ml (0,1 mg) toutes les minutes en IVD jusqu’au rétablissement de l’état hémodynamique. Chez l’enfant 1 µg/Kg/min.
Si non amélioration : perfusion 0,1 µg/kg/min puis adapter selon l’évolution.

REMPLISSAGE : par les cristalloïdes (NaCl 0,9%) 20 ml/Kg à adapter selon l’évolution.

β2-STIMULANTS : (Bricanyl® ou Ventoline®) : en aérosol et seulement en cas de bronchospasme (dyspnée et sibilants).

CORTICOTHÉRAPIE IV : à débuter le plus tôt possible bien que leur action est tardive.

ANTIHISTAMINIQUES : d’intérêt secondaire dans les réactions anaphylactiques. Action plutôt préventive. À préférer les antihistaminiques de 2ème génération : prise journalière unique et non sédatifs mais contre-indiqués chez l’enfant.
SURVEILLANCE de 6 à 24 heures, les rechutes sont possibles dans les heures qui suivent +++, sortie avec consignes orales et écrites lorsque le patient est stable.

PRÉVENTION :

RECHERCHEZ LA CAUSE afin de prévenir les récidives +++, Les causes fréquentes sont médicamenteuses, alimentaires, piqûres d'insectes, etc.

Prescrire un stylo d'auto injection d'Adrénaline pour les sujets à risque

 

 

 

 

 

Pour en savoir plus :

Prise en charge de l’anaphylaxie en médecine d’urgence.

Bibliographie : Recommandations de la Société française de médecine d’urgence (SFMU). Ann. Fr. Med. Urgence (2016) 6:342-364

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Photo : wikipedia

TESTEZ VOS CONNAISSANCES :

Question :

En cas d'allergie aiguë à la pénicilline avec érythème généralisé, signes de choc et pouls rapide ou filant, LE meilleur traitement efficace et immédiat est : ?

  1. Anti histaminique injectable,
  2. Corticoïde injectable,
  3. Perfusion NaCl 0.9%,
  4. Adrénaline

Réponse :

En cas d'allergie aiguë grave (état de choc, œdème de Quincke), le traitement efficace à action immédiate est ... ADRÉNALINE

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Cours du Pr S. Bouchoucha (Réanimation)

COMPÉTENCES A ACQUÉRIR
1. Identifier l’étiologie et les mécanismes d’une hyponatrémie par l’interrogatoire, l’examen clinique et quelques examens Biologiques appropriés
2. Déduire les traitements symptomatiques de chaque hyponatrémie en fonction de ses mécanismes

Connaissances indispensables : Bilan hydro sodé et ses facteurs de régulation – notion d’osmolalité
L’hyponatrémie est une perturbation biologique fréquente, dont le diagnostic est conventionnellement retenu quand la natrémie est inférieure à 135mmoles/L.
Les hyponatrémies, dans la grande majorité des cas asymptomatiques, sont découvertes habituellement de manière fortuite, à l’occasion d’un bilan systématique lors d’une consultation ou d’une hospitalisation.

Dans quelques cas cependant, quand elles sont profondes (< à 120mmoles/L) et surtout d’installation brutale (moins de 48H), elles peuvent s’accompagner de manifestations cliniques, digestives (dégoût de l’eau, nausées, vomissements...), musculaires (asthénie, crampes) et surtout neurologiques (troubles de la conscience, convulsions).

Ces troubles neurologiques qui constituent la principale menace des hyponatrémies sévères et imposent l’hospitalisation en unité de soins intensifs, sont l’expression d’une modification importante et rapide de l’osmolarité extracellulaire, qui au niveau cérébral, est responsable d’un œdème pouvant entraîner un engagement.
Ces manifestations cliniques ne sont cependant pas spécifiques de l’hyponatrémie et avant de les lui attribuer, il importe d’écarter d’autres causes, notamment neurologiques (AVC, traumatismes crâniens, intoxications, hypoglycémies...).

La prise en charge de l’hyponatrémie en hospitalisation courante ou en ambulatoire, nécessite une analyse minutieuse des mécanismes de l’hyponatrémie, pour identifier l’étiologie d’une part et définir la stratégie de correction hydroélectrolytique d’autre part.
Les données cliniques (contexte, état de l’hydratation extracellulaire et de la volémie) et quelques paramètres biologiques (osmolalités sanguines et urinaires calculées ou mesurées, ionogramme urinaire...) sont les principaux instruments de cette démarche diagnostique

Lisez la suite : téléchargez ce cours en PDF

Lisez aussi notre article : Que faire aux urgences devant une hyponatrémie

Pr Mounir Grira (neurologie)

AIT : "Épisode bref de dysfonction neurologique dû à une ischémie focale cérébrale ou rétinienne, dont les symptômes cliniques durent typiquement moins d’une heure, sans preuve d’infarctus aigu".
L’AIT est une urgence diagnostique et thérapeutique.

Le risque précoce d’AVC après un AIT est élevé. Il est possible d’identifier, par un score simple, des patients à haut ou faible risque.

 Le bilan étiologique doit être réalisé au plus vite afin d’adapter les mesures de prévention.

Téléchargez le document Accidents ischémiques transitoires (AIT) en PDF :
 AIT Diaporama en PDF

 L’intubation en séquence rapide (crash induction) est la méthode recommandée en médecine d’urgence pour le patient à l'estomac plein. Elle est décrite par WALLS, en 1996, comme étant «une série d’actions spécifiques destinées à obtenir de manière optimale et rapide une intubation orotrachéale chez un patient», et plus précisément en «l’administration quasi simultanée de sédatifs et d’un agent de blocage neuromusculaire afin de faciliter l’intubation orotrachéale».

 L’intubation en séquence rapide (ISR) se déroule en différentes phases successives :

 

  1. Préparation du patient et du matériel.
  2. Pré-oxygénation du patient en oxygène pur.
  3. Prémédication dans certaines situations particulières (atropine, xylocaine)
  4. Sédation : administration d'un hypnotique
  5. Relaxation musculaire : administration d'un curare
  6. Protection des voies aériennes, en appliquant la manœuvre de Sellick.
  7. Introduction du tube
  8. Gonflage du ballonnet
  9. Vérification de la position du tube par l'auscultation pulmonaire bilatérale et symétrique, confirmée par six tracés successifs et identiques au capnogramme
  10. Relâchement de la manœuvre de Sellick.

 Intubation trachéale et sédation aux urgences

 Voir notre Diaporama en PDF par Dr Anis Ghaddab médecin anesthésiste : Télécharchez

En dehors de l'intubation d'un patient en arrêt cardiaque, qui ne nécessite pas de sédation, toutes les autres indications de l'intubation trachéale justifient à priori une sédation accompagnée ou non d'une analgésie. L'utilisation de produits anesthésiques lors de l'intubation trachéale a pour but de faciliter le geste et d'assurer le confort du patient. Elle ne doit pas aggraver l'état cardiorespiratoire antérieur et doit être rapidement réversible pour restaurer une ventilation efficace en cas de difficulté d'intubation. De même, le risque d'inhalation bronchique doit être minimisé au cours de la procédure puisque les patients sont comme ayant un estomac plein
- La sédation en cas d’ISR se fait par l'administration intraveineuse d'un hypnotique d'action rapide (ÉTOMIDATE: 0,5 mg/kg) et d'un curare dépolarisant de courte durée d'action (SUCCINYLCHOLINE: 1 mg/kg). En cas de contre indication, on utilisera le ROCURONIUM à la dose minimale de 0,9 mg/kg.
Cette induction anesthésique doit être associée à la manœuvre de Sellick afin d'éviter tout risque de régurgitation. En attendant que la curarisation soit effective, maintenir l’oxygénation avec le masque de manière étanche durant toute la phase jusqu’à l’intubation. Gonfler le ballonnet immédiatement et vérifier la position correcte de la canule d’intubation; ensuite on pourra arrêter la manœuvre de Sellick.
- D'autres médicaments sont d'emploi plus difficile pour l'intubation en urgence :
• Le PROPOFOL peut, à dose élevée (2 à 3 mg/kg), permettre l'intubation sans adjonction de curare. Néanmoins, son retentissement hémodynamique en limite largement l'usage.
• Le MIDAZOLAM n'est pas supérieur à l'ÉTOMIDATE et ses caractéristiques pharmacocinétiques et pharmacodynamiques n'en font pas un bon agent d'induction.
• Le THIOPENTAL est à déconseiller en raison de son retentissement hémodynamique.
La sédation et l'analgésie continues doivent être débutées le plus tôt possible après l'intubation. L'association Midazolam-Fentanyl (MIDAZOLAM 0,1 mg/kg/h, FENTANYL 2 à 5 µg/kg/h) est la plus utilisée en gardant à l'esprit ses effets vasodilatateurs et hypotenseurs.

HYPNOTIQUES :

Les effets hémodynamiques et respiratoires des Benzodiazépines (MIDAZOLAM = HYPNOVEL®) sont faibles chez le sujet sain: somnolence, hypotension, hypoventilation alvéolaire.
Les autres hypnotiques : PROPOFOL (DIPRIVAN®), ÉTOMIDATE (HYPNOMIDATE®), THIOPENTAL (THIOPENTAL®, NESDONAL®), KÉTAMINE (KÉTALAR®).

CURARES :

Les curares agissent en bloquant la transmission synaptique neuromusculaire et en entrainant une myorelaxation. Les curares sont des compléments de la sédation et ils ne peuvent être utilisés qu'en association avec des hypnotiques, des benzodiazépines et/ou des morphinomimétiques. Toute curarisation implique une ventilation artificielle.
La curarisation facilite l'intubation endotrachéale à condition d'injecter une dose de curare suffisante pour obtenir un relâchement musculaire complet et de n'intuber qu'après le délai nécessaire à l'installation de l'effet maximal du curare.
Effets indésirables communs des curares : Paralysie respiratoire, bradycardie, libération d’histamine (hypotension, bronchospasme). La bradycardie est à prévenir par l’atropine.
Le CELOCURINE est un curare dépolarisant qui agit comme l'acétylcholine en se fixant sur ses récepteurs et en les activant. Il est contre indiqué si atteinte musculaire congénitale, syndrome de dénervation, brûlures graves, déficit congénital en cholinestérases plasmatiques, antécédents personnels ou familiaux d'hyperthermie maligne, d'hyperkaliémie connue ou suspectée, de rhabdomyolyse traumatique. Ses effets indésirables sont l’allergie, l’hyperkaliémie, la bradycardie, les troubles du rythme, l’hyperthermie maligne et les spasmes musculaires.
Les autres curares non dépolarisants : ROCURONIUM (ESMERON®), BROMURE DE VECURONIUM (NORCURON®), BÉSILATE DE CISATRACURIUM (NIMBEX®).

MORPHINE ET MORPHINOMIMÉTIQUES :

Les morphiniques sont les médicaments de référence pour le traitement de la douleur chez les patients en ventilation contrôlée et sous couvert d'un monitorage adapté.
FENTANYL (FENTANYL®), REMIFENTANIL (ULTIVA®), SUFENTANIL (SUFENTA®).


La manœuvre de SELLICK :

La manœuvre de SELLICK est une technique de compression du cartilage cricoïde, décrite en 1961 par SELLICK BA. Elle est utilisée pour prévenir le risque de régurgitation du contenu gastrique et œsophagien vers le pharynx et son inhalation bronchique et alvéolaire lors de l'induction anesthésique qui entraine une dépression des réflexes de protection des voies aériennes, chez un patient dont l’estomac est plein.
La compression du cartilage cricoïde en poussant la trachée vers l'arrière en exerçant une pression sur le cartilage cricoïde du patient et en comprimant l'œsophage contre les vertèbres cervicales. L'intensité de la force à exercer pour prévenir la régurgitation doit être d'environ 20 Newtons si le patient est conscient et de 30 Newtons s'il est inconscient. Cette force est inefficace si inférieure à 10 N. La pression doit être interrompue en cas d’efforts de vomissements.
Contre indications

  • Vomissements actifs
  • Lésions du rachis cervical
  • Traumatisme laryngé
  • Trachéostomie
  • Diverticule pharyngé
  • Corps étranger dans les voies aériennes

Références :

  • Conférence d’expert: sédation et analgésie en structure d’urgence, mise à jour 2010, SFAR et SFMU
  • G. Kierzek et al. : Sédation en réanimation de l'adulte, EMC Anesthésie-Réanimation [36-710-A-10]
  • Conférence de consensus SFAR 2007 : Sédation et analgésie en réanimation (nouveau-né exclu)
  • Conférence de consensus SFAR 1999 : Modalités de la sédation et/ou de l'analgésie en situation extrahospitalière
  • F. Adnet,J.E. De La Coussaye, P. Jabre : Intubation en séquence rapide : quels médicaments utiliser en préhospitalier ? Réanimation (2010) 19, 622—626
  • M. Gazzah : mémento médicaments de l'urgence, Chapitre 10 : Les anesthésiques, édition 2011, p50-53