Prise en charge des intoxications médicamenteuses et par drogues récréatives

2020 - RFE communes SRLF - SFMU
Société de Réanimation de Langue Française
Société Française de Médecine d’Urgence
Révision du consensus 2005 sur les intoxications aigues.

Principaux points forts des recommandations : 

1) Évaluation de la gravité et orientation initiale :

- Aux urgences et à la régulation SAMU, il ne faut pas utilise les scores de la gravité du fait d’une surévaluation ou d’une sous évaluation de la gravité.
- Pour les patients pris en charge en structure d’urgence, les experts suggèrent de proposer une admission en réanimation/USC en cas :

  • de défaillance d’organe avérée (signes cliniques, biologiques, ou électro-cardiographiques (ECG) nécessitant une surveillance rapprochée et/ou une prise en charge spécifique
  • d’exposition à tout médicament ou substance cardiotoxique en présence de tout signe objectif anormal (clinique, biologique ou ECG)
  • d’exposition à tout médicament ou drogue à dose supposée toxique pouvant conduire à une défaillance d’organe (neurologique, cardiovasculaire et/ou respiratoire) et ce, même pour un patient peu ou pas symptomatique pris en charge dans un délai inférieur à 6 heures après l’exposition supposée (ou supérieur, si forme à libération prolongée).

2) Conduite diagnostique et place des analyses toxicologiques :

Les experts suggèrent de solliciter l’avis d’un centre antipoison CAP et/ou d’un centre expert en cas d’intoxication médicamenteuse ou par drogue récréative de gravité particulière ou complexe.

3) Traitement symptomatique :

- Dans les situations de défaillance hémodynamique, neurologique ou respiratoire (non réversibles par un antidote), les experts suggèrent le recours à une intubation trachéale avec induction à séquence rapide.

4) Décontamination :

- Il ne faut probablement pas réaliser systématiquement un lavage gastrique chez un patient suspect d’ingestion médicamenteuse ou de drogue récréative.
- Les experts suggèrent de réaliser un lavage gastrique dans un délai inférieur à 1 heure, en l’absence de contre-indication et en cas d’ingestion d’une substance non carbo-adsorbable, à dose supposée toxique et à fort potentiel lésionnel.
- Il ne faut probablement pas administrer de charbon activé de façon systématique à un patient suspect d’ingestion médicamenteuse ou par drogue récréative.
- Les experts suggèrent d’administrer une dose unique de charbon activé en l’absence de contre-indication et dans un délai inférieur à 1 heure après l’ingestion d’une substance carbo-adsorbable à dose supposée toxique.
- Les experts suggèrent de réserver l’administration de doses répétées de charbon activé à l’ingestion d’un un médicament à libération prolongée ou d’une substance ayant un cycle entéro-hépatique marqué en cas de dose supposée toxique ou d’intoxication potentiellement grave.

5) Traitement épurateur :

- Les experts suggèrent le recours à une épuration extra-rénale afin d’augmenter la clairance du toxique et/ou prévenir les complications en cas d’intoxications graves par lithium, metformine, salicylés, phénobarbital, acide valproïque ou théophylline. La technique d’hémodialyse intermittente doit être privilégiée. L’avis d’un centre expert ou d’un CAP reste souhaitable.
- Les experts suggèrent d’induire une diurèse alcaline pour augmenter la clairance des salicylés en cas d’intoxication symptomatique.

6) Place des antidotes :

- Il faut probablement utiliser le Flumazénil chez un patient présentant un coma supposé par surdosage en benzodiazépines lorsque son état nécessite une intubation/ventilation mécanique, afin de l’éviter. L’utilisation du flumazénil est contre-indiquée en cas de co-intoxication avec un produit pro-convulsivant ou en cas d’un antécédent connu d’épilepsie.
- Il faut utiliser la Naloxone chez le patient présentant un coma supposé par surdosage en opioïdes lorsque son état nécessite une intubation/ventilation mécanique, afin de l’éviter.
- Il faut administrer la N-acétylcystéine en cas d’ingestion unique d’horaire connu, si la paracétamolémie réalisée après la 4eme heure post-ingestion est au-delà de la ligne de toxicité hépatique selon le nomogramme de Rumack & Matthew (ligne des 150 mg/L à la 4eme heure).
- Les experts suggèrent d’administrer systématiquement la N-acétylcystéine en cas de forte suspicion d’ingestion de paracétamol à doses toxiques sans interpréter la paracétamolémie (sur le nomogramme de Rumack & Matthew), dans les cas suivants :

  • Horaire inconnu. Le traitement est poursuivi si la paracétamolémie est non nulle ou les ALAT élevées.
  • Facteurs de risque avérés (hépatopathie chronique, carence nutritionnelle). Le traitement est poursuivi si la paracétamolémie est non nulle ou les ALAT élevées.
  • Admission tardive, au-delà de la 24eme heure post-ingestion avec augmentation des ALAT.
  • Ingestion répétée de paracétamol à dose suprathérapeutique. Le traitement complet doit être administré et sera poursuivi si élévation des ALAT.

7) Spécificités liées aux intoxications par drogues récréatives :

- Chez un patient suspect d’intoxication par drogue récréative, les experts suggèrent de rechercher des signes cliniques de gravité et de réaliser des examens paracliniques guidés par le ou les types de drogues consommées.
- Les experts suggèrent d’administrer la cyproheptadine en cas d’hyperthermie attribuable au toxique chez un patient présentant une intoxication par NPS (notamment par cathinones) en association au traitement symptomatique.

8) Particularités des intoxications aux cardiotropes :

- Les experts suggèrent d’administrer un antidote chez tout patient suspect d’intoxication par cardiotrope présentant un critère de gravité clinique ou pronostique, selon les modalités propres à chaque molécule
- En cas d’hypotension artérielle d’origine toxique, il faut effectuer en 1ère intention un remplissage vasculaire. Il faut administrer une catécholamine en cas d’échec du remplissage vasculaire.
- En cas d’état de choc toxique, en l’absence d’évaluation hémodynamique, les experts suggèrent l’utilisation en première intention de la Noradrénaline ou de l’Adrénaline en fonction de la présentation clinique et du toxique en cause.
- Les experts suggèrent de mettre en place une assistance circulatoire par ECMO veino-artérielle (VA) afin d’améliorer la survie chez des patients intoxiqués par cardiotropes, en arrêt cardiaque réfractaire ou en état de choc réfractaire au traitement pharmacologique.

Texte complet des recommandations à télécharger en PDF du site SRLF

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