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Des progrès concernant la physiopathologie et le traitement de noyade.

Les appellations anciennes noyade primaire, noyade secondaire, noyade sèche (selon les circonstances) et les définitions anglophones (near drowning en cas de survie) sont désormais abandonnées au profit d’une définition unique.

Le magnésium (Mg), ou sel d’Epsom, est un élément chimique connu depuis des siècles. Il est le cinquième métal le plus abondant de la croûte terrestre et le troisième composant des sels dissous dans l'eau de mer. C’est un solide d’aspect blanc-argenté soluble dans l’eau.

LE MAGNÉSIUM DANS L’ORGANISME :
La quantité de Mg dans l’organisme sous forme de cation (Mg++) est environ 25 g, essentiellement au niveau des os, dents, muscles et 1% dans le sang. La magnésémie normale chez l’adulte est de l’ordre de 0,70 à 0,90 mmol/L (soit 18 à 22 mg/L) mais en pratique il est très difficile de la doser avec précision. Il intervient dans au moins 300 réactions enzymatiques. Il joue un rôle essentiel dans le fonctionnement des muscles, du système nerveux, du rythme cardiaque et accélère le transit digestif.

L’apport alimentaire journalier est de l’ordre de 300 et 400 mg (6 mg/kg/j).

  • Les aliments riches en Mg sont les céréales intégrales (pas dans la farine), les fruits de mer, le cacao, le chocolat, les amendes, la banane et différents fruits et légumes. Certaines eaux minérales sont plus riches en Mg que l’eau de robinet.
  • Les besoins en magnésium sont encore majorés en période de forte croissance, pendant la grossesse et l’allaitement, ainsi que chez le sportif et chez les personnes âgées. 
  • Des déficits en magnésium et une excrétion urinaire accrue de magnésium peuvent survenir chez les personnes souffrant de résistance à l'insuline et/ou de diabète de type 2.

L’élimination du Mg est rénale. En cas d’insuffisance rénale on observe une hypermagnésemie.

LE MAGNÉSIUM EN MÉDECINE :

Le magnésium médicament existe sous forme de comprimés, poudre, solutés injectables et aussi associé à plusieurs autres produits pharmaceutiques comme excipient tels que les alginates, pansements intestinaux, anti acides et laxatifs.
Le sulfate de magnésium heptahydrate MgSO4 fait partie de la liste des médicaments essentiels de l’OMS.

LES INDICATIONS PRINCIPALES :

1/ Carence :

Les signes de carence sont discrets et non spécifiques, il faut la suspecter toujours devant une hypokaliémie et une hypocalcémie. En cas d’hypomagnésémie sévère, on observe des engourdissements, des crampes musculaires, des tremblements ou une irrégularité du rythme cardiaque.

Le déficit en Mg peut se voir en cas de manque d’apport alimentaire, d’élimination excessive par voie digestive (diarrhées chroniques) ou urinaire (diurétiques). Les personnes âgées, les diabétiques, les femmes enceintes, sont particulièrement exposées à ce type de problème.

Un supplément de Magnésium peut être proposé sous forme de solution ou comprimés à la dose de 350 - 400 mg/jour.
Dans les formes graves : perfusion intraveineuse de 1,5 g à 2 g de sulfate de magnésium heptahydraté par 24 heures.

2/ Constipations :

Le Mg par voie orale est un puissant laxatif par augmentation de l'hydratation et du volume du contenu colique par effet osmotique. Il faut une dose supérieure à 350 mg en une seule prise.

3/ Les crampes musculaires :

La crampe musculaire est une contraction involontaire non commandée par le cerveau. Le magnésium est relaxant, il est largement utilisé pour prévenir les crampes nocturnes des membres inférieurs. Mais, selon plusieurs études, son efficacité est douteuse, il est comparable au placebo (5)(2).

4/ Traitement préventif et curatif de la crise d'éclampsie :

Le Mg a des effets neuro-protecteurs et anti-comitiaux. Le MgSO4 est recommandé car il est supérieur au diazépam, à la phénytoïne et à l'association (phénergan, dolosal, largactyl) pour le traitement d’une crise en cours et pour la prévention de sa récidive. (7)( 9).

  • Bolus de 4 g de MgSO4 15 % en perfusion sur 20 minutes sous surveillance médicale et en absence de contre indications. Puis perfusion d’entretien à la pousse seringue électrique à 1 g/h de MgSO4 15% pur.
  • La durée de la perfusion d’entretien : 24 heures maximum. Le nouveau-né peut présenter des signes de toxicité au magnésium, y compris la dépression neuromusculaire ou respiratoire lorsque la perfusion dure plus que 24 heures.
  • En cas de manifestations cliniques de surdosage, la perfusion doit être arrêtée, l’injection de Gluconate de calcium est envisagée et la magnésémie sera mesurée.
    Prudence en cas d’association avec les antihypertenseurs (Loxen ++) à cause du risque d’hypotension.

5/ Traitement curatif des torsades de pointes avec QT long :

Les effets anti-arythmiques des sels de magnésium sont liés à leur action stabilisante de membrane.
Le sulfate de magnésium est le traitement de première intention à la dose de 2 g I.V. en 5 minutes, suivie d’une perfusion continue de 3 à 20 mg/min jusqu’à diminution du QT. Le traitement de la cause est primordial.

6/ Traitement de l’hypokaliémie associées à une hypo-magnésémie:

Le potassium KCl est le traitement essentiel.
Le sulfate de magnésium en perfusion lente peut être prescrit et sera interrompu dès normalisation de la magnésémie.

7/ Traitement de l’asthme et l'exacerbation de BPCO :

  • Utilisé depuis longtemps dans l’asthme du fait qu'il relâche les muscles lisses des bronches, les études effectuées n’ont pas prouvé une efficacité supérieure aux bronchodilatateurs. La nébulisation n’est plus indiquée. Une perfusion de sulfate de magnésium en dose unique 2 g en 20 min peut être faite dans les formes sévères après échec des autres thérapeutiques (1)(4).
  • Dans les exacerbations des broncho-pneumopathies obstructives (BPCO) l’utilisation de magnésium par voie inhalée n’est pas recommandée (6). Aucune indication dans les BPCO.

8/ Magnésium et COVID-19 :

SRAS-CoV-2, la maladie causée par le nouveau coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère, est apparue en 2019 et a causé une pandémie. Les ventes de compléments alimentaires ont augmenté après l'émergence de COVID-19 car de nombreuses personnes espéraient que ces produits pourraient fournir une certaine protection contre l'infection ou aider à réduire la gravité de la maladie.
Actuellement, les données sont insuffisantes pour étayer les recommandations pour ou contre l'utilisation du magnésium ou du zinc pour prévenir ou traiter le COVID-19.

CONTRE INDICATIONS ET PRÉCAUTIONS :

  • Contre-indication formelle : insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine inférieure à 30 ml/min).
  • La solution de sulfate de magnésium heptahydraté doit être administrée en injection intraveineuse lente chez le sujet allongé. La dilution se fait par le sérum glucosé 5% ou NaCl 0,9%.
  • Surveillance de la tension artérielle lors de l'injection intraveineuse et la perfusion continue.
  • Le sulfate de magnésium est susceptible de potentialiser l'action des curares non dépolarisants et les antihypertenseurs.
  • Surveiller la calcémie.

SURDOSAGE :

 L’intoxication au Magnésium est peu fréquente mais met en jeu le pronostic vital.
 L’intoxication est grave à partir de 3 mmol/L. Souvent iatrogène par surdosage ou lors d’une insuffisance rénale sévère.

Les signes d’intoxication :
- Nausées, vomissements, sueurs, rougeur
- Troubles de la conscience,
- Diminution des reflexes ostéotendineux ROT, puis abolition.
- Paralysie neuromusculaire (analogue à celle de la curarisation)
- Dépression respiratoire
- Hypotension (vasoplégique, puis mixte)
- Bradycardie

Conduite à tenir :

* Dans les formes mineures :
Arrêt de l’administration de Magnésium. Lorsque la fonction rénale est normale, la magnésémie se normalise rapidement

* En cas d’intoxication grave et symptomatique :

- L’antidote est le Gluconate de Calcium 10% (Amp 10 ml = 1 g) . À administrer par voie IV à la dose de 1 g en IV lente sur 10 minutes (attention : contre indiqué si patient est sous digitaliques).
- L’effet du Ca++ est immédiat mais transitoire.
- La dialyse est envisagée en cas d’insuffisance rénale.

PRÉSENTATIONS INJECTABLES :

  • SULFATE DE MAGNESIUM 15 % ® solution injectable IV Amp 10 ml = 1,5 g (0,15 g/ml)
  • SULFATE DE MAGNESIUM 10 % ®, solution injectable (IV) Amp 10 ml = 1 g (0,1 g/ml)
  • SULFATE DE MAGNESIUM 5 g/10 ml 50% ® solution injectable (IV) Amp 10 ml = 5 g
    (Dilution : prélever 2 mL de sulfate de magnésium 50 % [500 mg/mL] et diluer avec 48 mL d’une solution glucosée 5 % ou de NaCl 0,9 % pour un volume total de 50 mL pour obtenir une solution à 20 mg/ml)
  • CHLORURE DE MAGNESIUM 10 % ®, solution injectable (IV) Amp 10 ml

PRÉSENTATIONS ORALES :

  • Mag 2® : comprimés, ampoules et sachets buvables
  • Magnésium®
  • Magnésium Vitamine B6®
  • Mégamag®
  • COMPLÉMENT ALIMENTAIRE : plusieurs présentations commercialisées. 
    En 2012, les autorités de santé européennes se sont prononcées sur un grand nombre d'allégations santé relatives au magnésium. Elles ont interdit plusieurs de ces allégations, faute de preuves suffisantes. L'efficacité des compléments de magnésium dans la prévention de l'ostéoporose ainsi que dans le traitement du stress, de l'anxiété et des migraines n'a pas été démontrée (2).

© 2017-2021 * Dr Mounir Gazzah - 


RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES :

1. British Thoracic Society : British guideline on the management of asthma 2016
2. Dictionnaire VIDAL
3. F. Sztark : Le magnésium est-il un médicament ? MAPAR 2002. Site : mapar.org
4. Global Initiative for Asthma : GINA 2017 Pocket Guide for Asthma Management and Prevention. site : ginasthma.org
5. MAISONNEUVE, Hubert & col. : Les crampes idiopathiques nocturnes des personnes de plus de 60 ans: prévention et thérapeutique. Médecine thérapeutique pédiatrie, 2015, vol. 21, no. 3, p. 196-201
6. Prise en charge des exacerbations de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) - Recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Française (SPLF). Revue des Maladies Respiratoires 2017;34(4):282-322
7. SFAR/CNGOF/SFMP/SFNN : Prise en charge multidisciplinaire des formes graves de pré-éclampsie. Recommandations formalisées d’experts communes 2009. Site : sfar.org
8. RAPHAËL Maurice & Col. : Y a-t-il une place pour le sulfate de magnésium en médecine d'urgence ? MT. Médecine thérapeutique 2005, vol. 11, n°3, pp. 207-211
9. Réanimation des formes graves de pré éclampsie. Conférence d’expert. SFAR. 11 avril 2013. Site : sfar.org
10. Tatsumi H : A case of cardiopulmonary arrest caused by laxatives-induced hypermagnesemia in a patient with anorexia nervosa and chronic renal failure. J Anesth. 2011 Dec;25(6):935-8.

Alfred Nobel, inventeur de la dynamite à partir de la NITROGLYCÉRINE, ne se doutait pas que ce produit servirait à un autre usage plus bénéfique à l’humanité.

 

C’est au 19ème siècle, observant des fortes migraines chez les fabricants d’explosifs, que des chercheurs découvrent l’action vasodilatatrice de la NITROGLYCÉRINE.

L’action anti-angor de cette molécule a été décrite par le cardiologue William Murrel en 1879. Afin de rassurer les médecins et les patients et les convaincre qu’elle n’est pas un pétard, on lui a donné un autre nom : TRINITRINE.

Les dérivés nitrés existent sous différentes formes galéniques, permettant leur administration par voie sublinguale, transdermique, orale, ou intra-veineuse.

Leur mécanisme d’action dans l’organisme est lié au radical monoxyde d’azote (NO) qui, par l’intermédiaire d’enzymes, libère la GMPc, diminue la concentration intracellulaire du calcium et provoque une relaxation des muscles lisses des vaisseaux sanguins.
L’action la plus spectaculaire est la dilation des artères coronaires ce qui permet une meilleure oxygénation du cœur.
La dilatation, par un mécanisme peu connu, est préférentiellement veineuse d’où la diminution des volumes télédiastoliques et de la précharge ventriculaire. Autrement dit une amélioration de la fonction cardiaque.

INDICATIONS, CONTRE INDICATIONS et POSOLOGIE : Téléchargez le document en PDF

Pr. Ag. Youssef Chaker – Chirurgien

Les objectifs de ce cours :

Reconnaître la fréquence des brûlures caustiques du tractus digestif supérieur et les principaux agents caustiques.

Décrire les différentes lésions digestives et extra-digestives rencontrées dans les BCTDS.

Réunir les éléments cliniques et paracliniques permettant d’évaluer la gravité d’une œsophagite caustique.

Planifier la prise en charge initiale d’un patient victime d’une ingestion de caustique en tenant compte du bilan lésionnel initial.

Citer les pathologies qui peuvent poser un problème diagnostique avec les BCTDS.

Établir la stratégie thérapeutique d’un patient victime d’une ingestion de caustique à la phase de séquelles.

Téléchargez ce document en PDF : Les brûlures caustiques du tractus digestif supérieur

Place des D-Dimères dans le diagnostic des thromboses veineuses profondes et de l’embolie pulmonaire

Pr Touhami Mahjoub (Biologiste)

Le taux de D-dimère dans le sang est normalement inférieur 0,50 microgrammes par ml, soit 500 µg/L

Ajuster ce taux selon l'âge, il est (= âge x 10) après 50 ans, exemple pour un patient de 75 ans le seuil des D-dimères est à 750 μg/L.

I- INTRODUCTION :

Les marqueurs biologiques de l’état pré thrombotique et de thrombose sont nombreux.

Les plus étudiés et le plus intéressant est le dosage des produits de la fibrine « les D-Dimères ». L’existence des fragments D sous forme dimérique dans le plasma témoigne la présence de caillot de fibrine stabilisé par des liaisons covalentes facteur XIII dépendantes; préalablement à l’attaque par la plasmine.

En urgence les D-D représentent un marqueur biologique de thrombose de grande valeur prédictive négative, de bonne sensibilité (90 à 100%) mais de faible spécificité. La valeur prédictive négative (reliée à la sensibilité) signifie qu'un résultat normal permet d'exclure le diagnostic.

La sensibilité qui exprime le pourcentage de résultats anormaux trouvé chez le patient atteint de la maladie (pourcentage de vrais résultats positifs).

Leur spécificité qui exprime le pourcentage de faux positifs, c'est à dire des résultats anormaux trouvés chez les patients exempts de la maladie (ou inversement, le pourcentage de vrais résultats négatifs).

 

II- PROCESSUS DE FORMATION DES D-DIMÈRES :

Au cours d’un processus de thrombose ou d’hémostase secondaire à une lésion vasculaire, il y a génération de thrombine. La thrombine a des fonctions multiples dont la transformation du fibrinogène en fibrine. Pour cela, la thrombine libère à partir de la molécule de fibrinogène, quatre petits fragments : deux fibrinopeptides A et deux fibrinopeptides B. La molécule de fibrinogène ainsi amputée devient un monomère de fibrine.

Les monomères ainsi formés se polymérisent, pour former un gel de fibrine appelé polymère de fibrine soluble et qui est encore mécaniquement fragile.

La thrombine active le facteur XIII (--> XIIIa = facteur stabilisant la fibrine). Ce facteur XIIIa crée alors des liaisons covalentes entre les monomères de fibrine, notamment entre des domaines appelés D. Le gel de fibrine est alors stabilisé et devient insoluble.

La présence de fibrine dans l’organisme déclenche un processus de fibrinolyse réactionnelle. Ce processus fait intervenir un enzyme protéolytique, la plasmine. La plasmine découpe la fibrine insoluble pour donner des produits de dégradation de la fibrine qui portent la structure D-D formée par la création d’une liaison covalente par le facteur XIIIa, entre deux domaines D de deux molécules distinctes de monomère de fibrine.

Cette structure D-D prouve qu’il y a eu génération de thrombine. On donne donc le nom de D-Dimères à ces produits de dégradation de la fibrine. Ils se distinguent donc de l’appellation générale de PDF. En effet, les PDF peuvent aussi bien être des Produits de Dégradation de la Fibrine (et donc contenir des D-Dimères), que des Produits de Dégradation du Fibrinogène (et donc ne pas contenir de D-Dimères). La présence de produits de dégradation du fibrinogène peut s’observer dans les fibrinolyses aiguës ou dans les thrombolyses par la streptokinase quand l’excès de plasmine, après avoir découpé la fibrine du thrombus, découpe ensuite le fibrinogène.

Le dosage de ces fragments D-Dimères fait appel à des techniques utilisant des anticorps monoclonaux très spécifiques.

III- TECHNIQUES DE DOSAGE DES D-DIMERES :

Actuellement, il existe plusieurs types de techniques :

L’agglutination de macro particules de latex recouvertes d’anticorps. Cette technique est de réalisation très rapide, mais n’est pas suffisamment sensible. On peut l’utiliser pour le diagnostic des CIVD mais pas pour le diagnostic d’exclusion des thromboses veineuses profondes (TVP) ou de l’embolie pulmonaire (EP).

L’agglutination des hématies du sujet à tester en présence d'un complexe formé d'un anticorps monoclonal spécifique pour les D-Dimères et d'un anticorps monoclonal qui se lie à la membrane du globule rouge. En présence de D-Dimères (>0,2 µg/mL) il y a agglutination des hématies. Ce test peut être pratiqué au lit du malade sur sang natif ou au laboratoire sur sang citraté. C'est un test unitaire, rapide adapté à l'urgence. Sa sensibilité est réduite et il ne fait pas mieux que les tests d’agglutination de particules de latex classiques.

Le dosage par méthodes ELISA (type sandwich) dans laquelle les D-Dimères sont piégés par un anticorps de capture qui les fixe à la matière plastique d’une microplaque, puis révélés par un autre anticorps couplé à un révélateur coloré. Cette technique est relativement coûteuse et assez longue à mettre en oeuvre (deux heures au minimum). Ainsi, les méthodes ELISA traditionnelles ne sont adaptées ni à l'urgence nécessaire pour un usage clinique, ni au dosage individuel. Il existe aujourd'hui des méthodes ELISA simplifiées ou automatisées, adaptées à l'urgence et au dosage individuel. Les performances de ces tests (sensibilité, valeur prédictive négative) sont comparables à celles des méthodes ELISA traditionnelles.
Le dosage par immuno turbidimétrie dans lequel deux anticorps monoclonaux anti-D-Dimères sont fixés sur des microsphères de latex. En présence de D-Dimères, il y a agglutination des microparticules, ce qui induit une augmentation de la turbidité du mélange réactionnel, mesurée sur la gamme des analyseurs STAÒ (Diagnostica Stago) Le résultat est disponible en sept minutes. Les performances de ce test STA-Liatest D-Di (sensibilité, valeur prédictive négative) sont comparables à celles des méthodes ELISA traditionnelles.
IV- UTILISATION PRATIQUE :

Les D-D est un test biologique d’excellente valeur prédictive négative; permettant l’exclusion de thrombose veineuse et d'embolie pulmonaire. En effet en dehors des maladies thromboemboliques (thromboses veineuses profondes et embolies pulmonaires) et du syndrome de défibrination (CIVD), les D-Dimères sont augmentés chez les sujet âgés, la femme enceinte, au cours des cancers, de l’infarctus du myocarde, d’infections virales et bactériennes, en période post opératoire, perfusion IV et cathéters centraux.

Aujourd’hui le dosage des D-D s’inscrit dans la stratégie diagnostique de l’embolie pulmonaire et des thromboses veineuses profondes. Il permet de limiter le recours aux techniques d’imagerie, qui sont coûteuses, lourdes et invasives uniquement aux patients ayant des taux élevé en D-Dimères ou forte probabilité de thrombose.Wells a définit un score pour évaluer la probabilité clinique de l’embolie pulmonaire

1- DIAGNOSTIC POSITIF

Le dosage des D-Dimères est inutile dans le diagnostic positif d’embolie pulmonaire ou de TVP. La présence de D-Dimères ne signifie pas obligatoirement présence de thrombose. En effet, on peut observer une élévation des D-Dimères en post-opératoire, au cours de la résorption d’un hématome, au cours de la grossesse, dans les phénomènes inflammatoires qui entraînent une augmentation du taux de fibrinogène. Le taux augmente aussi avec l’âge.

2- DIAGNOSTIC D’EXCLUSION

A défaut de poser le diagnostic positif, en raison de leur excellente valeur prédictive négative les D-Dimères peuvent être utilisés pour identifier avec le plus de certitude possible, les patients qui ne présentent pas de thrombose.

Cependant il faut établir une distinction entre les patients hospitalisés et les patients ambulatoires. En effet, une grande majorité de patients hospitalisés ont des valeurs élevées de D-Dimères, en l’absence de thrombose à la phlébographie. La valeur prédictive négative est donc meilleure pour les patients en ambulatoire.

3- SEUILS DE DÉCISION CLINIQUE

Les méthodes de dosage des D-Dimères sont très nombreuses. En raison des différences existant entre les divers anticorps monoclonaux utilisés par les différents fabricants, les seuils à partir desquels le test peut être considéré comme positif, sont variables. Ces seuils, combinant meilleure sensibilité et meilleure spécificité, sont déterminés par des centres évaluateurs amenés à valider cliniquement ces réactifs. Sur la base de ces études cliniques, chaque fabricant doit être en mesure de pouvoir proposer des valeurs seuils en fonction des différents types de pathologie (TVP proximale, TVP distale, thrombose veineuse superficielle, EP).

Pour le test STA-Liatest D-Di, pour un seuil de décision clinique à 0,5 µg/mL, la valeur prédictive négative varie selon les études entre 94,4 % et 100%. Le laboratoire de biologie doit indiquer ces seuils de décision clinique sur le compte rendu d’analyse.

V- CONCLUSION :

Pour le diagnostic positif de maladie thromboembolique, quelle que soit la méthode, la spécificité et la valeur prédictive positive des dosages de D-Dimères sont médiocres, de l'ordre de 50%, parce que les causes d'augmentation de D-Dimères sont nombreuses en dehors des thromboses veineuses.

Cette spécificité est très mauvaise chez les malades hospitalisés (15 à 30%) mais acceptable (50 à 70%) chez les malades externes suspects de thrombose, qui n'ont pas d'autre raison d'avoir une augmentation du taux de D-Dimères.

Pour le diagnostic d’exclusion de la maladie thromboembolique, de nombreux travaux, tous concordants, ont établi que dans le diagnostic d'une thrombose veineuse et d'une embolie pulmonaire un dosage de D-Dimères a une sensibilité et une valeur prédictive négative supérieure à 95%, sous réserve que le dosage soit effectué avec une méthode sensible. Cependant, certains auteurs, notamment Bauer de Boston estiment qu’une valeur prédictive négative de 95% est insuffisante. Cet auteur préconise pour les suspicions de TVP de coupler une échographie et un dosage de D-Dimères. La négativité des deux évite d’avoir recours à des explorations plus invasives, telles que la phlébographie par exemple. Pour l’embolie pulmonaire, il préconise de rajouter aux deux examens précédents une scintigraphie pulmonaire, les trois tests devant être normaux pour éviter d’autres explorations.

Avec les méthodes moins sensibles type latex, la sensibilité et la valeur prédictive négative sont de l'ordre de 80 à 85%, c'est à dire que le risque de ne pas détecter l'épisode thromboembolique est de 15 à 20%, ce qui est en pratique inacceptable vu la gravité potentielle de ne pas traiter un malade atteint de maladie thromboembolique.

On comprend dès lors l'intérêt accordé aux nouvelles méthodes ELISA simplifiées ou immuno-turbidimétriques, rapides, dont l'évaluation montre qu'elles ont des performances identiques à celles des méthodes ELISA traditionnelles.

Il est important que le biologiste soit conscient de ces problèmes afin qu'il puisse conseiller utilement le clinicien confronté au diagnostic des phlébites et des embolies pulmonaires, et choisir un réactif validé par des travaux cliniques de qualité.

© Pr Touhemi Mahjoub - efurgences.net